
« Qui dans la salle ne connaît pas Olivier Schwob ? » Avec un sourire complice, la directrice du cinéma Diagonal Noémie Bédrède compta lentement, cherchant parmi les 240 places de la salle 2 bien remplie : « 1, 2…, 3… » Très peu de doigts se sont levés. À ses côtés, le réalisateur venu présenter son documentaire de 52“ tourné au nord de Montpellier. Et devant sa famille, ses amis, ses collègues quasi exclusivement !
De poussière et de fracas
Et pour cause. Le deuxième* film d’Olivier Schwob, Stock-car family, est avant tout une histoire d’amour et d’amitié. Elle est composée par le regard tendre et bienveillant qu’Olivier porte sur deux familles rencontrées par l’intermédiaire de sa femme, Michèle, dont il partage la vie depuis près de quarante ans. Mais pour ce Parisien d’alors, fraîchement débarqué, comme pour le Montpelliérain qu’il est devenu, la détonante passion que ses amis vouent pour le stock-car a toujours semblé défier gentiment la raison. Pourquoi leur vie tourne-t-elle à ce point autour de cette piste ovale de terre, de poussière et de fracas ? Pourquoi ces membres du Stock-car club gangeois, majoritairement de Brissac (Hérault), taxis de père en fille, techniciens du BTP, maçons, mais aussi professeure de danse, luthière, infirmière… passent-ils autant de week-ends et de nuits à mettre au point de vieilles voitures pour les réduire aussitôt à un tas de tôle ? « Ça m’évoque un peu le livre de Lionel Terray que j’ai lu quand j’étais ado, Les conquérants de l’inutile, même si le sujet n’a rien à voir », commentait Olivier Schwob ce soir de projection à Montpellier, le 3 juin dernier.
Ingénieur du son sur des films de Robert Kramer, Agnès Varda, Bertrand Tavernier, Quentin Dupieux, Youssef Chahine, Jacques Rivet et bien d’autres, il a choisi de franchir à nouveau le pas de la réalisation pour révéler la réalité de cette drôle de passion, l’esprit ouvert et dans une douce intimité qui bouscule les préjugés.
Quel avenir pour ce « sport mécanique original » et sa fédération éponyme menacés par la prise de conscience des enjeux écologiques ? La question se pose, forcément.

« On ne fait pas dans la dentelle »
Mais la réponse ne peut évidemment pas être abordée par le documentaire de façon objective. « Les liens qui m’unissent à toutes ces personnes présentes dans le film ne pouvaient pas être abîmés par le tournage, c’était la condition que je me suis donnée. J’ai donc montré les images à chacune pour qu’elles les valident », confesse Olivier Schwob. Mais tous ses “acteurs“ et “actrices“ ont accepté ce questionnement. Y compris ces adeptes du stock-car depuis trois générations qui voient leur passion comme une « tradition ».
Certes, « on ne fait pas dans la dentelle. Ce n’est pas délicat », sourit malicieusement l’une des contributrices du film à l’écran. Mais au fond, est-ce vraiment de bruit et de fureur dont il est question ? De la vie de ces familles dont Olivier Schwob nous révèle avec modestie le quotidien, émerge paradoxalement une quiétude qui contraste avec le tumulte de leurs week-ends, et nuance sensiblement tout propos péremptoire qui pourrait en rompre la bruyante harmonie.
Subtilement réalisé – l’évocation d’une issue possible alors que défile le générique de fin est astucieuse – le film ne manque d’émouvoir. Il nous laisse sur un sentiment de bonheur léger, celui de faire un peu partie de cette attachante family, ne serait-ce que par procuration.
À voir sur www.cinemutins.com
* En fanfare est le premier documentaire co-réalisé par Olivier Schwob, avec Marin Rosensthiel. Il montre la préparation du 20e anniversaire du festival des fanfares de Montpellier en 2015. En accès gratuit sur : www.cinemutins.com/en-fanfare
Légendes :
1- Deborah Gottero, spécialiste des tonneaux, est championne de France, catégorie spectacle.
2 L’affiche.