Le projet était ambitieux. Inauguré à l’occasion des journées du patrimoine 2017, Maison Rouge, à Saint-Jean-du-Gard, aura mis quinze ans à se concrétiser, a coûté près de 14 M€ et connu quelques péripéties. Reconnu musée de France par le ministère de la Culture, l’écrin de la collection de Daniel Travier, initiateur du projet et fondateur du musée des Vallées cévenoles, est à la (dé)mesure de ses 30 000 pièces.

Musée de société
Premier site industriel de soie européenne et dernière filature à avoir été en activité en France (1965), Maison Rouge est un lieu symbole doté d’une architecture remarquable. Avec ses murs habillés de schiste et ses claires-voies en châtaignier, la nouvelle extension contemporaine qui prend désormais place le long des bâtiments historiques s’intègre parfaitement, portant à 3 600 m2 la surface totale du site. Conçu pour faire le lien avec les collections du musée, l’aménagement paysagé s’articule autour d’un espace végétal (avec restaurant) et d’un parc botanique imaginé par l’ethnobotaniste Alain Renaux.
C’est par l’escalier monumental en fer à cheval que se fait l’entrée du musée. Imaginée par Marion Lyonnais, la scénographie se déploie autour de cinq thèmes identitaires – le paysage construit, l’arbre à pain, l’arbre d’or, l’habitat et la vie domestique, et le fait religieux – plaçant l’objet au centre du discours. « La scénographie met en valeur l’œuvre d’une vie de recherche et de collecte, l’érudition d’un homme passeur de vies », souligne Marion Lyonnais. Une bibliothèque du xviiie, témoignage d’une société imprégnée de culture jusque dans les campagnes, une charrette patinée par ses voyages, un panier terrarium à l’origine du façonnement des terrasses cévenoles, une machine à dévider les cocons des vers à soie dans la salle de la filature…, le musée présente près de 10 000 pièces de collection. « Ces objets ne sont pas là par esthétisme mais parce qu’ils sont les témoins d’une société et d’une civilisation d’hommes et femmes qui les ont utilisés », rappelle Daniel Travier.
Maison Rouge n’a, pour autant, pas vocation à être uniquement un lieu de mémoire, il s’inscrit dans la contemporanéité des Cévennes, sorte d’écomusée traversant le temps (du xviie siècle à nos jours) et l’histoire. « L’enjeu de ces collections, et de ce projet scientifique et culturel, est de faire le pont entre tradition et modernité », explique Carole Hyza, conservatrice des musées d’Alès Agglo.
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Un lieu structurant pour le territoire
Fermé cet hiver, le musée Maison Rouge sera lancé officiellement au printemps 2018, une ouverture programmée en deux temps. « Nous sommes en phase d’expérimentation et cela va donner le temps aux Cévenols de s’approprier le lieu. Un musée, ça se règle », précise Carole Hyza qui étudie d’ores et déjà plusieurs pistes – pass culturel entre les trois musées, expositions temporaires, conférences et lectures, animations culturelles, accueil de scolaires… pour faire du site un marqueur identitaire fort. Mais aussi une porte d’entrée sur le territoire, en partenariat avec les différents acteurs touristiques de la région (Parc national des Cévennes, la Bambouseraie, le petit train… ). Alors que la conservatrice vise la première année 80 000 visiteurs, Alès Agglo prédit une fréquentation nettement plus ambitieuse (200 000 visiteurs !). Et entend bien faire de Maison Rouge l’un des plus grands musées de société en France.

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Un projet qui revient de loin

Acheté en 2002 dans le cadre d’un PER (Pôle d’Exploitation Rural) par le Grand Alès avec l’idée d’accueillir les collections du musée des vallées cévenoles, trop à l’étroit dans la grand-rue de Saint-Jean-du-Gard – le Musée Maison Rouge a connu pas mal de vicissitudes avant de voir le jour. En septembre 2002, des inondations retardent l’obtention du permis de construire ; il faudra attendre 2010 pour que le ministère de la Culture dégage, dans le cadre du plan Musée en Régions, 70 M€ pour 79 musées en France dont celui de Maison Rouge (2,5 M€). Le cabinet d’architecte lyonnais Vurpas est chargé de la mise en œuvre du projet et le chantier démarre fin juin 2014. Suite à la mise en liquidation de quatre entreprises locales, les travaux (9,6 M€) prennent du retard. La polémique enfle autour du montant global conséquent (près de 14 M€, soit 2 M€ de plus que prévu, financé par l’État, l’Agglo d’Alès, le Département, La Région et le Feader). Maison Rouge est finalement inauguré en septembre 2017.

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