Exit les « trublions » dont la faute principale était surtout de s’être « compromis » avec des adversaires politiques
Si l’enfer est pavé de bonnes intentions, le paradis est-il pavé de mauvaises ? Espérons-le. Dans ce cas, les polémiques récentes qui agitent le monde culturel montpelliérain nous bâtissent de solides chaussées et, quoique impénétrables, ces voies nous conduisent à coup sûr vers une éternité radieuse.
Du projet controversé de musée de la France en Algérie, qui ressurgit sous l’impulsion du rapport Stora, à la nomination chahutée du nouveau directeur du MoCo, le politicologue Emmanuel Négrier dit vrai, l’influence frêchienne dans les comportements politiques montpelliérains reste vivace.
Déjà le prédécesseur de M. Delafosse à la mairie de Montpellier en avait épousé les mauvaises manières. Sitôt arrivé aux manettes, Philippe Saurel s’était livré à une purge, non pas stalinienne, quoique brutale, mais très inspirée de celle dont usa Georges Frêche lorsqu’il conquit la Région. Exit les « trublions » dont la faute principale était surtout de s’être « compromis » avec des adversaires politiques.
Quant au très frêchien projet de musée, qui devait flatter l’électorat pied-noir – important à Montpellier – en vantant « les aspects positifs de la colonisation », les experts de l’époque avait trouvé son concept « honteux ». Mais nul besoin pour Georges Frêche de les virer, ils avaient claqué la porte d’eux-mêmes.
Aujourd’hui, c’est au tour de Michaël Delafosse de reprendre à son compte les méthodes de son maître. Et qu’importe si, à l’école des beaux-arts, étudiants et professeurs s’en émeuvent unanimement. Aux commandes de leur institution, une tête devait tomber, celle de Nicolas Bourriaud. L’ex-directeur du MoCo n’a certes pas brillé par sa diplomatie en confessant notamment ne pas avoir « envie de travailler avec des gens à qui il faut tout réexpliquer ». Il incluait M. Delafosse, pourtant concepteur de la Panacée, le centre d’art qu’il dirigeait, et invitait à voter Saurel. Plus qu’une maladresse, une faute.
Si en quelques mois à peine, le projet initié par Nicolas Bourriaud avait déjà conquis le monde des arts, en France comme à l’étranger, il n’a pas su servir la cause locale, chère à tout politique. A fortiori sur les terres de feu l’imperator Frêche. Par ses déclarations partisanes et peu amènes, il a mis en péril son projet et l’avenir de ceux qu’il a mobilisés pour le mettre en œuvre. Ce sera donc la tâche allouée à Numa Hambursin, une personnalité elle-même plutôt… franche !
À lui, M. Delafosse, restera à administrer la preuve de sa diplomatie. Car revenir sur le projet de musée de la France en Algérie ne sera pas une sinécure. Tel le caillou dans la chaussure, les bases « honteuses » qui l’ont inspiré seront tels des grains de sable sous les fondations du futur musée, qui risquent de rendre à jamais bancal tout l’édifice.
Pour les athées, il ne fait pas de doute que le paradis se vit mieux sur Terre, incarnés. Mieux vaudrait ainsi pour eux que de bonnes intentions pavent la vie culturelle ici-bas, naturellement, coutumièrement. Et ce ne sont certainement pas les artistes – ni les gens du spectacle vivant qui occupent les théâtres, partout en France et en Occitanie – qui contrediront cette assertion.