Faut-il détourner les yeux et attendre que ça passe ?
Ne rien dire et ne pas faire de vagues. Telle était peut-être la manière de survivre au camp de Rivesaltes, comme semble en témoigner l’œuvre de Josep Bartoli, héros et héraut rescapé de l’enfer dont il fut le prisonnier.
Ou alors Silenci, ce tableau en une dont l’artiste est l’auteur (un diptyque en réalité – voir ci-contre), dénonce-t-il plutôt la lâcheté de celles et ceux qui savaient ?
L’humanité est capable du pire, on le sait ; l’histoire l’a montré si souvent. Et l’actualité quotidiennement, qui continue de nous apporter images et témoignages d’un présent oppressant ici, là-bas et ailleurs.
Alors, faut-il détourner les yeux et attendre que ça passe, tels les singes de la sagesse ? « Non », nous dit Bartoli.
Tandis que cette pandémie rend fou, que des propos haineux sont tenus sur les plateaux de la campagne présidentielle française, et que des bruits de bottes se font entendre en Europe, se pose alors partout la question de l’action.
Lorsqu’on est architecte comme Thomas Landemaine, que les prix du logement s’envolent, que le foncier se raréfie et qu’on refuse standardisation et paupérisation, ont crée Yvivre pour proposer des concepts de maisons collectives et individuelles innovants.
Lorsqu’on est élu ou citoyen, à devoir défendre un territoire contre des projets d’infrastructures routières ou ferroviaires qui le menacent, on se mobilise pour que la loi soit respectée et que le débat se tienne malgré tout, en dépit des failles de la démocratie locale et nationale.
Lorsqu’on est directeur d’une vénérable école des beaux-arts, comme Philippe Saulle à Sète, et que la ville entière semble prête à en défendre le caractère patrimonial, on accompagne l’aventure de sa rénovation, modestement, mais efficacement.
Lorsqu’on est chorégraphe, comme Christian Rizzo, et que son horizon s’assombrit, « show must go on », nous dit en substance sa joyeuse mélancolie.
Lorsqu’on est le nouveau directeur d’un musée régional d’art contemporain, qui dispose d’un fonds exceptionnellement riche, comme Clément Nouet à Sérignan, on témoigne d’un dynamisme et d’enthousiasme contagieux.
Lorsqu’on préside au destin d’une communauté de communes, comme c’est le cas de celle de la Vallée de l’Hérault, on fédère les compétences et on catalyse les initiatives notamment en créant un lieu tel que L’alternateur.
Lorsqu’on est passionnés de photographie et qu’on se soucie de l’anthropocène, comme l’association Cétavoir, on programme une exposition édifiante pour en témoigner.
Lorsqu’on dirige un studio de production de films d’animation, et qu’on sent le besoin de démocratiser les sciences, comme l’équipe de Mad Films à Montpellier, on crée des programmes d’anticipation pour la télévision, attractifs et pédagogiques.
À chacun de choisir son camp, avant qu’on le lui impose.