Éditorial 83

Par Fabrice Massé

«

Le dynamisme culturel d’un territoire se nourrit lui-même

»

L’institution fait le larron

Martial Raysse aime Sète. Le peintre, qui est l’invité du musée Paul Valéry jusqu’au 5 novembre, y vient chaque été avec sa femme, l’artiste Brigitte Aubignac. Tous les deux vouent une relation particulière à la ville portuaire et à la fraîcheur de ses canaux, pour des raisons intimes. Pour l’environnement culturel qu’offre aussi la ville, bien sûr. L’exposition Raysse, œuvres récentes n’aurait d’ailleurs jamais vu le jour sans cela. Or, c’est un événement.

Ainsi, il n’est pas abusif d’affirmer que le dynamisme culturel d’un territoire se nourrit lui-même dans une sorte de cercle vertueux, et qu’il en va de même pour l’économie, le social, l’environnement, la démocratie…

Comme le rappelle Vincent Pons, Prix du meilleur jeune économiste 2023 : « Douglass North (Nobel d’économie 1993) a montré comment les institutions structuraient le comportement économique des individus. » (Le Monde du 22 mai). Le professeur à Harvard qui s’intéresse également aux modalités de la vie démocratique ajoutait : « L’alternance politique améliore les performances économiques. »

Alors que le mot « décivilisation » a resurgi dans le débat et que la réforme des retraites a nourri une solide défiance vis-à-vis du président Macron et des institutions françaises, la conclusion qu’on peut en tirer vient spontanément : quoi qu’on pense de cette loi, si l’institution fait le larron, le larron a fait la décivilisation !

Car c’est bien la même culture politique verticale qui dirige la France depuis des décennies. Et c’est bien elle qui produit en retour la rébellion, l’ensauvagement, l’inertie…, elle qui démobilise.

Martial Raysse, lui-même victime semble-t-il d’une institution à son heure, a préféré tourner la page de la société de consommation et du spectacle. Mais il continue de commenter à sa manière érudite l’air du temps.

Un air du temps qui s’emballe et a plus que jamais besoin de promouvoir la culture et notamment au niveau européen. Ça tombe bien, c’est justement ce projet que portent collectivement, horizontalement, près de 173 communes de l’Hérault. Preuve s’il en est que ladite décivilisation est toute relative !

Un air du temps qui a aussi besoin de promouvoir sa culture urbaine et festivalière dans un environnement frais, à l’ombre de grands arbres et d’une végétalisation retrouvée. Des conditions propices aux rencontres et au dialogue apaisé.

Des villes se mobilisent, des festivals aussi. Ce sont ces institutions qui feront durablement les larrons… en foire !

PS À l’heure où nous bouclons, Guillaume Séchet de Météovilles informe : « les cumuls de pluies estimés sur Toulouse après l’orage d’aujourd’hui sont assez sidérants car on a l’impression que l’îlot de chaleur urbain toulousain a pleinement joué son rôle d’alimentation du phénomène : jusqu’à 70 mm dans le centre de la ville rose et quasiment rien dans les zones rurales du nord et du sud de la ville !»
Son tweet nourirra très à propos l’article page 10.