Éditorial 87

Par Fabrice Massé

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En sa condition de femme et d’ouvrière, elle prend la pose affirmant fièrement ne pas être sujet mais modèle

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Territoires européens

Peut-on définir un art de ville écologique comme on identifie désormais un art écologique ? Entendons par là un art de faire la ville et de la faire vivre qui soit écologique et qui serait admis par tous, hors de toute considération partisane, politicienne ou militante. C’est en tout cas une quête qui mérite d’être considérée, non ?

Un art de vivre dans la cité – la ville ou le village, cela va de soi – supposerait que chaque habitant s’implique sans même y penser dans une routine quotidienne où chaque geste s’inscrirait dans un souci de durabilité planétaire, sans pression sociale ni contrainte véritable, mais avec le seul désir de bien faire, par amour-propre et respect de l’autre. Une question de savoir-vivre, de culture, voire d’identité, en somme.

Imaginons qu’après des mois passés sous des températures planétaires records, où chaque saison de l’année, faite d’inondations, sécheresses, incendies, exils, incrémente un nouveau seuil vers l’inexorable. Imaginons alors qu’un sentiment partagé puisse étreindre soudain une assez large part de l’humanité et lui indiquer un chemin, des étapes, un but…

Quels seraient-ils ?
Lisons les pages à suivre et voyons ce qu’elles nous inspirent.

Le chemin du soin est peut-être le premier qu’on pourrait emprunter. Comment concevoir, en effet, qu’on puisse bâtir l’avenir sans un logement décent, par exemple ? Permettre à ceux qui en ont le plus besoin de souffler enfin et de pouvoir à leur tour s’occuper de leur famille et d’eux-mêmes. C’est ce vers quoi certains s’engagent en ce moment en répondant à l’appel d’Habitat et Humanisme.
Rejoindre une association et œuvrer en son sein solidairement pour corriger les dysfonctionnements de la société semble en effet une voie pertinente. Contre les défauts de la démocratie locale, certains se tournent vers Anticor et débusquent avec courage la corruption. Que serait une ville en transition sans probité, sans justice ?
S’ouvrir l’esprit, accueillir solidairement l’expression singulière des gens de théâtre d’ici et d’ailleurs fait indéniablement partie d’une écologie de l’âme. La Cité européenne du théâtre se veut ce cadre bienveillant ; elle souhaite aussi divertir. Unis dans la diversité… Chiche ?
Et quand le but devient le sujet ? L’art écologique s’en mêle, vu de la Caza d’Oro ou de l’Institut supérieur des arts et du design de Toulouse, et porte son regard révolutionnaire – rond et curieux –, avide d’éthique et de mondes pas si imaginaires. On écoute, on observe, on se réjouit… Oui !
Et, à propos de regard, puisons dans les Archives départementales de l’Aude. On y découvre celui d’une Joconde occitane exhumée par Marilina Prigent. En sa condition de femme et d’ouvrière, elle prend la pose affirmant fièrement ne pas être sujet mais modèle. Un modèle à suivre, assurément.
Femmes ouvrières, femmes musiciennes, même combat. Annie Coste nous le confirme en un best-seller redoutable. Quand l’art devient écologique alors qu’il reste encore si peu féminin, l’éco-féminisme est-il un concept si étrange ?
Le festival Rio Loco nous emmène sur les traces d’Ulysse et de ses antiques sirènes (déjà créatures féminines musiciennes et perfides). Mieux qu’un chemin, une odyssée parmi les territoires méditerranéens, berceau de notre civilisation et pourtant oscillant encore entre exil et liberté.
Hissons la grand-voile, alors, et avec Voilensac, recyclons les anciennes contre le vent mauvais. Avec Yellowscan, les cartes des zones aquatiques n’ont plus de secret pour nous. Et lors des prochaines escales, la moto 100 % électrique de Motowatt sera un moyen de locomotion sympathique pour aller au-devant de notre destin.