
Alors que la station balnéaire la plus proche se situe à une cinquantaine de kilomètres, la cité de Carcassonne s’offre un Face à la mer, prolongement du festival photographique de Tanger.
Fascinée comme nombre d’écrivains et artistes par le caractère cosmopolite et vivant du port marocain, Mina Mostefa, originaire de Carcassonne, a eu l’idée de monter à Tanger un projet photographique. Associés à Wilfrid Estève, photographe et directeur de l’agence de presse Hans Lucas, ils lancent en 2019 Face à la mer (FALM), avec l’ambition d’en faire une vitrine de la jeune photographie méditerranéenne. Au fil des éditions, à grand renfort de workshops, débats, projections et rencontres, l’événement (organisé pendant quatre jours en novembre) se développe et tisse des partenariats avec l’institut français du Maroc, le musée La Kasbah (site patrimonial)… Aujourd’hui, FALM réunit à chaque édition 80 photographes professionnels, confirmés ou émergents, et en accompagne près de 1 000.
Si l’arrivée du covid signe le retour du duo à Carcassonne,

La mise en service en 2024 d’une nouvelle ligne aérienne directe avec Tanger réactive les ardeurs. « Il devenait évident d’ancrer dorénavant le festival dans ces deux territoires, d’autant que Carcassonne recèle un vrai potentiel culturel », indique Mina Mostefa.
Pour sa première en France, le festival organise une exposition photographique de dix artistes ayant marqué les éditions de Tanger. Chacun investira un lieu de la cité médiévale. « Après des années d’implication à Tanger, proposer un regard croisé est une occasion unique de porter un nouveau regard humaniste sur la manière dont les problématiques sociales, politiques, économiques ou environnementales sont perçues de chaque côté de la Méditerranée », développe Mina Mostefa.
L’édition rendra d’abord hommage à trois photographes disparus : Yann Morvan, Leila Alaoui et Yzza Slaoui. Considéré comme l’un des plus grands photojournalistes, Yann Morvan a travaillé pour Libération, couvert une vingtaine de conflits, reçu plusieurs prix pour ses reportages (il avait notamment été pris en otage et torturé par le serial killer Guy Georges). L’occasion de (re)découvrir le travail d’un photographe toujours attaché à apporter une vision profondément humaine à travers ses portraits de personnes en lisière de la société.
Elle aussi était engagée à rendre compte des diversités sociales en utilisant un langage visuel aux limites du documentaire et des arts plastiques : l’artiste franco-marocaine Leila Alaoui est décédée de ses blessures lors des attaques terroristes à Ouagadougou, alors qu’elle couvrait un reportage sur le droit des femmes au Burkina Faso. Et toujours dans la même veine humaniste, Yzza Slaoui (prix révélation 2022) relayait admirablement les conditions des femmes et leur implication dans l’adversité.
Des inspirations spirituelles de Hamine Oulmakki avec ses figures hybrides mi-animal-mi humain aux paysages urbains d’Amine Houari, des skaters marocains de Yassime Sellame à la restitution du travail de Céline Croze lors de sa résidence FALM, cette première édition, entièrement gratuite, promet d’ouvrir les horizons, fenêtre sur un ailleurs, si loin si proche.
Du 24 au 31 mai
Légendes :
1- © Charaf Lahib
2- © Yzza Slaoui