Avec l’exposition Quelque chose comme une araignée, la lauréate du prix Photo sociale 2025 montre les réalités vécues par les personnes hospitalisées en institution psychia- trique. Ses prises de vue déconstruisent le regard que nous portons sur la folie et, peut-être aussi, interrogent la nôtre.
Il est assis sur un banc, de trois-quart dos, sans tête. Il apparaît tel un fantôme, dissimulé sous un tissu à rayures. Ses cheveux s’agitent, rendus flous par le mouvement, au point de figurer quelque chose comme la Gorgone ou comme une araignée… Les tirages s’affichent en noir et blanc, tandis que les voix et les citations des sujets photographiés rendent à ces corps, anonymisés pour des questions de droit, leur capacité de vie et de résistance. Marion Gronier a traversé plusieurs institutions psychiatriques, en France et au Sénégal pendant deux ans, pour documenter sa réflexion sur l’invisibilisation des sujets dits fous depuis les lieux qui les enferment, depuis les représentations qui les stigmatisent.

L’expérience est dérangeante. À s’aventurer dans l’univers labyrinthique de la santé mentale, là où l’irrationnel côtoie l’invisible, la menace est perceptible de perdre l’équilibre. À la suite de Michel Foucault et de son Histoire de la folie à l’âge classique, Marion Gronier expose la manière dont nous traitons nos fous et nous rappelle qu’elle est « symptomatique de la folie de notre société ». La photographe relève toutefois le pari de contourner l’écueil de la morale, pour garder le cap d’une éthique humaniste et solidaire : documenter les processus d’aliénation et d’exclusion à l’œuvre dans nos sociétés pour comprendre et révéler ce que nos regards détournent, notre propre folie. n

Jusqu’au 18 mai – https://chateaudeau.toulouse.fr