Dans le cadre de la manifestation À la lisière du monde (de demain), co-organisée par les Techniciens du spectacle vivant (TSV), la Ville de Villeneuve-lès-Maguelone et Montpellier-Sète 2028, Nebula de la Cie Arrangement Provisoire, parachevait un week-end de « concerts, spectacles, rencontres professionnelles et jeux pour impulser une réappropriation ludique, festive et créative du territoire, de l’eau, du vivant », selon la plaquette de présentation ; le tout en accès gratuit.

Et « pour repenser ensemble notre rapport au territoire, à l’eau et à la nature », l’écrin exceptionnel de la presqu’île de l’Esclavon, près de la plage du Pilou, offrait toutes les qualités. Servi à l’accueil, un cocktail à base d’eau, de jus de fruits et de charbon, a aussi contribué astucieusement à ce questionnement.

Quant au choix de cette programmation, également judicieux, il a majoritaire convaincu le public malgré un langage gestuel peu esthétisant. Ce soin a été confié à la plasticienne et scénographe Célia Gondol qui, dans cet environnement radieux de lagunes, a d’autant mieux hameçonné nos rétines.

Présenté comme de la danse en paysage, le solo de Vania Vaneau relevait ainsi plus de la performance que des canons de danse auxquels le public familial a pu s’attendre, ce dimanche après-midi.
Quoi qu’il en soit, malgré ce registre plus familier aux amateurs d’art contemporain et aux spectateurs du centre chorégraphique national de Montpellier (Vania Vaneau y est artiste associée), environ cent personnes ont paru captivées par l’outre-monde, sombre et tellurique, dessiné par Nebula.

Surgie d’on ne sait où, brandissant une lentille solaire, l’artiste investit l’espace après une longue procession, un disque de charbon et de poussière de bois, clairsemé des vestiges d’un potentiel passé disparu : pierres polies, cristaux, miroirs brisés… Comme par un rituel chamanique, son personnage semble convoquer esprits et éléments, selon un protocole tribal, antédiluvien, lapidaire ; la chorégraphie ésotérique passe par l’usage d’attributs comme des coupelles d’inox, des paniers d’osiers qu’elle vide ou remplit. L’univers est-il celui d’un jeu vidéo, issu de l’heroic fantasy Marvel, comme le titre Nebula le suggère ? Pas vraiment. La musique vibratoire, réverbérante, bourdonnante de Puce Moment (Nico Devos et Pénélope Michel), porte une gestuelle incantatoire qui pourrait virer à la transe à tout moment. Mais non, ou bien imperceptiblement. C’est peut-être le reproche qu’on pourrait formuler à la pièce. Transe et danse ne procèdent-elles pas d’une même cosmogonie ? La grâce chorégraphique a peiné parfois à sublimer celle de la scénographie. Malgré cette frustration passée, ce spectacle laisse au cœur de chacun une saine mélancolie qui répond pertinemment au questionnement des organisateurs.

N.B. La compagnie Arrangement Provisoire s’engage avec ses moyens dans une démarche écologique au sein de ses activités. Via la création et la tournée de Nebula, Arrangement Provisoire contribue financièrement à des associations de protection de l’Amazonie et de défense des peuples autochtones.

1 – À l’issue de la représentation, Vania Vaneau traverse une nouvelle fois le site pour saluer, sous les applaudissements.
© FM/artdeville

2 – Vania Vaneau en prêtresse post apocalypse, dans Nebula.
Copie d’écran – arrangementprovisoire.org – Frédéric Rouverand