On pouvait s’attendre à un son de réverbération, comme sous la nef d’une église. En l’occurrence plutôt une cathédrale tant la voûte de l’aven Armand est exceptionnellement haute : 45 m. Eh bien non ! Les milliers de concrétions et draperies qui sculptent les parois de la grotte du causse Méjean forment sans doute autant d’obstacles à ce type de propagation du son.
Nonobstant, l’ambiance cristalline des lieux entrait bel et bien en harmonie avec le chant hybride de Leïla Martial. Vocalises, onomatopées, samples… l’artiste primée entre autres aux victoires de la musique, mêlait parfois le son de sa voix pleine et claire à celui d’une flûte, dans un souffle haletant venu du cœur. Une atmosphère surnaturelle, ou supernaturelle, à laquelle le violoncelle de Valentin Ceccaldi contribuait de toute sa virtuosité, égrainant ses notes au gré des modulations baroques ou jazzy de la chanteuse, improvisant à son tour un bourdon grinçant ou un arpège sagace et raffiné.
Mais, dès le premier morceau, de Gabriel Fauré, écho il y eut… sur l’actualité. Les paroles d’Au bord de l’eau résonnaient bel et bien :
Sans nul souci des querelles du monde
Les ignorer
Et seuls, tous deux devant tout ce qui lasse
Sans se lasser
Sentir l’amour, devant tout ce qui passe
Ne point passer !
Pendant le concert, des gouttes détachées sporadiquement de quelque stalactite imprimaient un tout autre rythme sur nos crânes, beaucoup plus lent. Elles rappelaient si besoin l’extraordinaire cadre de ce concert et sa célèbre forêt de stalagmites qu’il a été possible de pénétrer à l’issue de la soirée. « Ne pas sentir, tant que ce rêve dure, le temps durer », chantait encore Leïla Martial. La native d’Ariège formée à Marciac évoquait plus tard, dans une autre chanson, tous ces « frères nés du ventre de la Terre chaque seconde ».
Une très belle façon d’ouvrir, samedi 28 septembre, la saison 2024/25 des Scènes croisées de Lozère, dont un pan important de la programmation s’intéresse à l’art en paysage et que Fanny Prud’homme, leur nouvelle directrice, entend pérenniser.
Les concerts sous roche de l’Aven Armand
Depuis 1989, la grotte de l’Aven Armand a accueilli plus de 60 concerts et invité nombre de pointures tels que Manu Dibango, Didier Lockwood, Stéphane Grapelli et bien d’autres. Ses concerts sous roche, organisés en partenariat avec la Délégation départementale à la musique et à la danse de la Lozère, ont également deux représentations du Cri du Caire et d’Erik Truffaz, en collaboration avec les Scènes Croisées de Lozère.