» C’est un temps de réflexion, un temps de mémoire, un temps pour rendre hommage à nos parents. » Le festival Origines contrôlées, organisé par le Tacktikollectif, n’a pas manqué son rendez-vous annuel à Toulouse. Du 20 octobre au 21 décembre 2023 célébraient les vingt ans de l’événement. Un moment festif et militant qui au fil des ans s’est solidement inscrit dans le panorama culturel toulousain. Tayeb Cherfi, responsable programmation et événement, a participé à « toutes les aventures » du collectif. Parler du festival, c’est comme remonter le temps avec lui.
L’histoire du collectif prend racine aux Izards, un quartier populaire de Toulouse. À l’époque, en 1997, le goût du festival est déjà présent et plusieurs événements sont organisés. Mais l’aventure prend un tournant majeur en 2001, à l’heure des élections municipales. L’association décide de se lancer en politique avec le mouvement Motivé-e-s, marqué à gauche de l’échiquier politique. Ses membres intègrent le Conseil municipal toulousain et se font porteurs de la lutte contre les discriminations. « Il y a eu une campagne assez raciste cette année. Nous, nous avons voulu donner un élément de réponse : la France nous remet en question donc nous allons raconter notre histoire, montrer qui nous sommes », se remémore Tayeb Cherfi. C’est ainsi, trois ans plus tard, qu’Origines contrôlées, un festival pour mettre en avant la culture des populations immigrées, a vu le jour en 2004.
Origines contrôlées en quête d’égalité
Derrière le nom de ce festival se cache un message très précis, raconte le membre du Tacktikollectif. « Évidemment c’est militant. Ça sous-entend que ce sont toujours les mêmes morphotypes contrôlés, qu’il y a un racisme quotidien », explique Tayeb Cherfi. Avec ce festival, l’idée est simple : « On va participer à la vie de la ville et partager notre culture avec ce pays et ses habitants. »
L’objectif est d’offrir un espace de parole, d’écoute et de rencontre entre les populations issues de l’immigration maghrébine et les Toulousains. Concert de musique, stand-up, littérature et débat viennent rythmer Origines contrôlées. Des tables rondes ? Oui, Tayeb Cherfi est catégorique : « La culture est politique. » Alors autant organiser un temps d’échange pour le bien des citoyens dans un seul et unique but : « La quête de l’égalité ».
Une vingtième édition sur un thème particulier
Cette année, les artistes ont performé pour les quarante ans de La Marche pour l’égalité et contre le racisme, « une marche historique, rappelle Tayeb Cherfi, où les jeunes, nés en France, manifestaient leur besoin d’être reconnus dans leurs différences et dans leur francité. » Pour l’occasion, Méziane Azaïche a ouvert le bal du festival avec son spectacle Ne me libérez pas, je m’en charge. Les jeunes du quartier des Izards ont mis le feu sur scène, tout comme Mouss et Hakim, membres du groupe Zebda, qui a vu le jour auprès du Tacktikollectif. S’en sont suivis des pièces de théâtre, des tables rondes et diverses expositions autour de La Marche pour l’égalité.
Origines contrôlées doit clôturer le 21 décembre 2023 au théâtre des Mazades en présence de Guillaume Meurice, à qui les membres du Tacktikollectif ont fait appel bien avant la polémique qui a enflé autour de l’humoriste*. Pour l’association, Guillaume Meurice « ne peut pas être résumé à une phrase ». « Nous n’avons pas de message politique à faire passer et nous ne sommes pas à l’origine de ses mots », donc son spectacle est maintenu. L’humoriste interprétera Meurice 2027, son dernier spectacle autour de la Réconciliation nationale. Un sketch « qui fait sens pour le festival », précise Tayeb Cherfi. Ce clap de fin laissera place au renouveau pour l’événement qui s’apprête à faire sa mue. « 20 ans, c’est un tournant. Le festival a cette forme qui fonctionne, mais on va faire un pas de côté pour le faire évoluer. »
*Le 29 octobre dernier, son sketch sur France Inter au sujet du Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, alors que la guerre entre Israël et le Hamas sévit, lui a valu des accusations d’antisémitisme. Saisie, l’autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) a précisé, selon l’AFP citée par différents médias, que ce sketch avait « porté atteinte au bon exercice de Radio France dans ses missions », précisant s’inquiéter des « répercussions sur la cohésion de notre société », à l’heure où les actes à caractère antisémite prospèrent. L’Arcom réaffirme également « l’importance [de] protéger la liberté d’expression des humoristes ».
Légendes photos :
• Chaâba Project.
• KT Gorique.
• Hakim et Mouss, membres du groupe Zebda.
• L’objectif est d’offrir un espace de parole, d’écoute et de rencontre entre les populations issues de l’immigration maghrébine et les Toulousains.