Depuis le 13 janvier, le Centre photographique documentaire de Sète propose enfin la double exposition des photographes Robin Friend et Igor Tereshkov. Initialement programmée dans le cadre de son festival annuel, ImageSingulières, elle fut annulée l’an dernier ; l’occasion de découvrir l’extension du siège de l’association organisatrice CéTàVOIR.

Si les deux artistes abordent chacun la question de l’anthropocène, leurs regards se distinguent nettement. Le premier, anglais, aborde son sujet en parcourant un « Bastard Countryside », titre de l’exposition, c’est-à-dire un paysage britannique, en lisière de la ville. Il y scrute avec raffinement cette campagne enlaidie par l’intervention humaine, où nature et culture se confrontent et laissent tels quels les stigmates de leur lutte insensée. La sensation qui subsiste, face au désastre, est rendue lyrique par des cadrages en couleurs tantôt spectaculaires, tragiques ou dérisoires…

À l’inverse, avec « Oil and moss », Igor Tereshkov explore en noir et blanc les paysages souillés par l’activité pétrolière en Russie. Volontaire pour une mission de Greenpeace, il part en 2018 à la rencontre des populations indigènes qui tentent de survivre avec leurs troupeaux de rennes parmi les écosystèmes dégradés. Sombres et gris comme ce nouveau mode de vie contraint des nomades à l’ouest de la Sibérie, les clichés d’Igor Tereshkov ont eux-mêmes expérimenté les outrages de cette marée noire lors du développement de la pellicule. Par une action de corrosion au pétrole de ses tirages, le photographe a créé des altérations aléatoires, trous et rayures qui renforcent comme s’il en était besoin l’absurdité dont l’artiste veut témoigner. En la mimant, en quelque sorte. « C’est, selon lui, de la malhonnêteté et de la violation des droits des personnes que naît la crise climatique », explique le dossier de presse d’ImageSingulières. Une analyse que les rennes saisis bondissant par le photographe semblent partager, évoquant aussi la crise de la biodiversité. Ils fuient le lasso de leur gardien, mais semblent filer vers un ailleurs plus sombre encore.
Vite, c’est jusqu’au 6 mars ! Entrée gratuite.

Les locaux de l’association CéTàVOIR, qui propose à l’année les expositions d’ImageSingulières, ont doublé leur surface cet automne et sont désormais dotés d’une vaste cour. Profitant du départ de l’école maternelle l’an dernier, au rez-de-chaussée du bâtiment, CéTàVOIR dispose aujourd’hui de 570 m2 (au lieu de 365 auparavant), dont environ 300 m2 de surface d’exposition. Sis au 15 rue Lacan, le lieu est mis à la disposition par la Ville de Sète.
L’association propose également des expositions hors les murs, à la gare de Sète (jusqu’en avril) et au musée ethnographique de l’étang de Thau, Bouzigues (jusqu’en mai).