C’est environ 1000 œuvres du peintre et affichiste Henri de Toulouse-Lautrec dont Albi a hérité il y a un siècle. Et pour cet anniversaire, la Ville a voulu « faire plaisir » au maître à qui elle doit sa notoriété internationale. En lui organisant en quelque sorte ce nouvel accrochage qui l’aurait sans doute ravi. Toute la ville se colorera pour son héraut « fin, pétillant et toujours moderne » annonçait fièrement Stéphanie Guiraud-Chaumel, présidente du musée et maire d’Albi. Quand Lautrec regarde Degas, titre de l’exposition, propose ainsi d’interroger les sources d’inspiration et d’influence de l’artiste albigeois, et tout spécialement donc celles qu’il partage avec cet autre illustre peintre du 19e siècle, Edgar Degas, de trente ans son aîné.

Dialogue permanent
L’admiration n’était pas réciproque semble-t-il, mais les deux ont fréquenté à Paris les mêmes endroits : cafés-théâtres, maisons closes, hippodromes… Ils connaissent bien sûr les œuvres l’un de l’autre quoique Degas soit déjà célèbre alors que Lautrec émerge encore.
Au cœur du Palais de la Berbie, cette impressionnante forteresse médiévale qui tient cadre au musée, 80 tableaux, dessins et sculptures se succèdent dans l’exposition. 40 appartiennent au musée, les autres œuvres ayant été prêtées principalement par celui d’Orsay, et par de grandes institutions et collections européennes.
La scénographie attentive rapproche les œuvres dont la ressemblance est parfois troublante. Comme Le Fauconnier de Degas et Le Comte Alphonse de Toulouse-Lautrec, peint par son fils Henri.

Parfois l’influence est directement visible : à l’arrière- plan d’un tableau de Lautrec, Mademoiselle Dihau au piano, c’est celui de Degas (même titre) qui apparait.
Lors de la visite inaugurale, grâce aux indications du régisseur des collections du musée d’Albi, Remy Trayssac, le public a pu mieux saisir ce dialogue permanent entre les peintres et leurs sujets communs. Alors que chacun des artistes s’attache à restituer sa vérité, une émotion, s’émancipant volontiers des codes esthétiques en vigueur, Lautrec et Degas cherchent à représenter le geste pur, quitte à laisser parfois visibles les repentirs. Femme nue, assise par terre, se peignant, de Degas, est à ce titre éloquent.
Mais Degas est plus mordant, précis, tandis que Lautrec est plus fantasque, son geste plus lâché. Degas utilise la photo tandis que Lautrec croque sur le vif la spontanéité de ses modèles, qu’il côtoie au quotidien. Degas est un peintre et sculpteur d’avant-garde, Lautrec un illustrateur et affichiste hors pair.

Autour de l’exposition et pour le centenaire, de nombreuses manifestations sont organisées, dont une balade lumineuse dans les pas de Toulouse-Lautrec. Dans le jardin du Palais de la Berbie, l’univers de Montmartre a été reconstitué par l’artiste CozTen ; une expérience immersive lumineuse et musicale qui place le visiteur au pied du Moulin rouge, au milieu des cabarets festifs de la Belle époque (en soirée).
Exposition visible jusqu’au 4 septembre.