La vocation première des centres dramatiques nationaux (CDN) est de créer et produire des spectacles pour être joués partout en France et à l’étranger. Ces CDN sont d’ailleurs dirigés à cet effet par des artistes, metteurs en scène et auteurs de théâtre eux-mêmes. Ils sont 38 en France et deux en Occitanie : le théâtre des 13 Vents à Montpellier dirigé par Nathalie Garraud et Olivier Saccomano et le ThéâtredelaCité à Toulouse, dirigé par Galin Stoev. Si les premiers sont également codirecteurs d’une compagnie, désormais associée à leur théâtre – et qui joue donc la totalité de leurs créations – le directeur du théâtre de Toulouse n’en disposait pas à son arrivée. Ainsi a-t-il créé L’AtelierCité composé de jeunes comédiens professionnels qui s’emparent des outils mis à leur disposition pour créer, sous la direction d’un metteur en scène, un spectacle qu’ils jouent au ThéâtredelaCité, puis en tournée.

Ainsi, verra-t-on cette année aux 13 vents la nouvelle création de Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, Nouveau monde, une fantaisie caustique sur la société contemporaine soumise, selon la mise en scène, au mécanisme absurde de l’innovation permanente et rendue plus ou moins aveugle par la standardisation qu’elle produit. La pièce sera créée au Printemps des comédiens de Montpellier (6 dates) et tournera notamment au Cratère d’Alès, sur la Scène nationale d’Albi et au Parvis de Tarbes, qui l’ont coproduite. La précédente création de N. Garraud et O. Saccomano, Un Hamlet de moins, prolongera aussi sa tournée régionale dans des lycées et maisons de quartier de l’Hérault.

Avec Molière Project (titre provisoire) Galin Stoev entend quant à lui « nous secouer, nous, public ». Pour ce faire, il convoque Dom Juan et explore la censure potentielle qu’un tel texte, très librement revisité par le dramaturge Ivan Viripaev – c’est leur 10e collaboration – pourrait susciter. La création n’est prévue qu’au 1er semestre 2026 mais on a déjà hâte ! Dans l’intervalle, nous pourrons continuer d’entendre parler d’amour avec Illusions créée ce printemps et à nouveau programmée en février 2024. Cette production 100 % théâtredelaCité issue de L’AtelierCité permettra aux sept jeunes comédiens de briller à nouveau sur un texte également signé de l’auteur exilé russe Ivan Viripaev, et mis en scène par Galin Stoev.

 

Comme dans la plupart des CDN – et c’est aussi le cas du Centre chorégraphique national de Montpellier et des scènes nationales (dédiées aux villes de moins de 100 000 habitants) – des artistes associés aux lieux pour deux ou trois ans créent également des spectacles avec les mêmes exigences artistiques et ambitions de diffusion. Des pièces souvent produites ou coproduites par ces structures culturelles, scènes nationales ou diverses et une mutualisation de leurs moyens techniques et financiers, indispensables. Cette saison 2024/25, la pièce Sur le chemin des glaces, de Bruno Geslin, créée ce mois d’octobre aux 13 Vents, sera rejouée les 5 et 6 février sur la scène nationale d’Albi, entre autres dates hors Occitanie. La pièce raconte la marche de Werner Herzog de Munich à Paris, en1974, pour conjurer la mort de son amie Lotte Eisner ; une marche qu’ont eux-mêmes entreprise Bruno Geslin et son équipe en 2023 et qu’ils restituent sur scène, mêlant théâtre, musique et cinéma. Autre création produite par les 13 vents, Roméo et Juliette sont morts, de Céline Champinot. Artiste associée au CDN depuis 2022, elle met librement en scène la passion amoureuse que l’on sait avec trois comédiens, enfermés dans un petit théâtre. Ils s’y remémorent leur jeunesse au club-théâtre… Du 21 au 24 janvier.

Au ThéâtredelaCité à Toulouse, seize coproductions cette année, en partenariat avec des compagnies locales et nationales. Parmi elles, la compagnie Baro d’Evel, qui explore les arts du cirque avec Qui Som ? (lire agend’Oc). La saison démarre avec Invisibili d’Aurélien Bory devenu depuis septembre directeur de Théâtre Garonne-scène européenne. Créée en Sicile et présentée à Toulouse du 5 au 9 novembre, la pièce du chorégraphie s’empare d’une fresque du XVe siècle pour nourrir un regard sur les angoisses contemporaines et la fonction salvatrice de l’art. Le ThéâtredelaCité coproduit Dynasty, de Sara Forever / Matthieu Barbin. L’artiste, dont le talent et les rencontres l’ont mené à performer dans les hauts lieux de l’art contemporain, est connu du grand public comme finaliste de Drag Race. Sur scène apparaît « sa mère, Dolly Parton », star de la musique américaine.

En coproduction avec le Théâtre Sorano, Marion Pellissier présentera son spectacle sur le mythe des Trois petits cochons du 21 au 23 janvier, une œuvre qui explore la transmission des drames familiaux. Dans le même thème, La nuit se lève de Mélissa Zehner, qui traite de l’inceste, sera jouée les 4, 5 et 6 février. Enfin, Lucie Lataste interprétera Je préfère regarder par la fenêtre en langue des signes au Sorano, du 23 au 30 janvier. Ce spectacle, accessible à tous, retracera l’histoire d’une jeune femme découvrant que son père biologique n’est peut-être pas le sien.

Le Théâtre Sorano s’associe au théâtre Garonne pour la neuvième édition du festival Supernova, qui offre, sur trois semaines, un aperçu de la création théâtrale contemporaine. Le théâtre Garonne coproduira quatorze créations cette saison, dont Signal to Noise, une réflexion sur les problèmes de connexion actuels. Quatre représentations seront jouées du 4 au 7 décembre. Cuerpos Celestes alliera arts visuels et poésie du 11 au 13 décembre. Du 21 au 25 janvier, La vegetariana explorera les interactions entre l’humain et le vivant. Pour accueillir le printemps, Gwenaël Morin mettra en scène Quichotte du 18 au 22 mars. La saison se conclura le 6 mai avec Dasta Avala, un spectacle musical en première au Théâtre Garonne.

Odyssud Blagnac reçoit des auteurs et des comédiens pour des productions destinées au jeune public. Avec un temps fort comme le festival Luluberlu, qui propose des spectacles pluridisciplinaires et des activités gratuites dans le parc d’Odyssud. Cette année, le festival se tiendra du 23 au 25 mai. Le théâtre soutient également le collectif Projet.PDF, qui présentera une création jeune public intitulée Je suis moi, qui es-tu ?, abordant les questions d’identité et de genre.

À Montpellier, le centre chorégraphique national – ICI, dirigé pour la dernière année par Christian Rizzo, présente deux coproductions en décembre : Heliosfera de Vania Vaneau, les 3 et 4, et Roukasskass club de Nadia Beugré le 11 décembre, toutes deux artistes associées au centre chorégraphique. Vania Vaneau instaure un dialogue entre corps et matières, cheminant entre danse et arts visuels, la lumière comme substance essentielle. Nadia Beugré mêle danse, musique et culture de la sape, à l’origine du Roukaskas, et y imprime les rythmes effrénés de la batterie, les figures virtuoses du hip-hop.

Au théâtre Molière, la scène nationale de Sète ( TMS), Félicie Artaud – Cie Joli mai, fait partie de l’archipel d’artistes que le TMS accompagne. Elle crée le 8 novembre La Louve et porte sur scène un récit de Clémentine Beauvais qui s’intéresse à notre rapport aux espaces et aux espèces sauvages (public à partir de 8 ans). Le 14 novembre, Les Hommes bleus, suivi de Entre chiens et loups, les 13 et 14 juin au Théâtre de la mer, explorent également le règne animal, avec un point commun : le cheval ; deux spectacles que le TMS coproduit.

Parmi l’archipel d’artistes également, Fabrice Melquiot dévoilera Cette note qui commence au fond de ma gorge, son spectacle musical, poétique et politique, un texte écrit intégralement en alexandrins. Il y est question d’amour et d’exil. En février (six dates et lieux multiples).
Le chanteur franco-marocain Walid Ben Selim, artiste compositeur en résidence au TMS, met en musique et en voix l’ultime œuvre du poète palestinien Mahmoud Darwich avec Le lanceur de dés, le 18 novembre. Il reviendra au printemps pour cinq dates, avec Here and now, toujours en porte-voix des plus grands poètes de langue arabe.

À propos d’archipel, le théâtre éponyme de Perpignan, également scène nationale, présente aussi Le joueur de dés, le 20 mai. Walid Ben Selim y est « artiste complice ». Le théâtre de l’Archipel compte quatorze résidences et coproductions. La saison a débuté en jazz le 9 octobre avec Cécile McLorin Salvant et son album Ghost Song. Elle se poursuit avec les artistes de la Main Harmonique le 12 novembre, et leur projet musical Artefacts, né des réflexions autour de la pandémie. La pièce Par Autan, fusionnant musique, magie et poésie sera présentée les 25 et 26 janvier au Théâtre du Radeau.

Le Théâtre La Cigalière, à Sérignan, accompagne la comédienne, metteuse en scène et autrice Aurélie Namur Elle présentera sa création Bienvenue Ailleurs le 14 novembre, après trois ans en résidence. Michèle Murray entame sa troisième saison avec La Cigalière et présentera sa pièce, Time, le 3 avril. Le théâtre coproduit sept spectacles.

Le chorégraphe Hamdi Dridi est artiste associé au Théâtre + Cinéma, scène nationale du Grand Narbonne. Dans le cadre du projet européen Stronger Peripheries, il propose Dans(e) House trio, un spectacle qui fusionne Orient et Occident en célébrant le féminin. Y sont combinées danse, cuisine et musique. Sur scène, trois danseuses tissent leurs histoires sur une ambiance joyeuse et rythmique marquées par une culture entre les deux rives de la Méditerranée. La création a eu lieu le 9 octobre ; les dates de la tournée ne sont pas encore connues.

 

Pyrenart II

Le projet de coopération transfrontalière, engagé en 2017, revient en une seconde version. Destiné à soutenir le développement et l’internationalisation des structures du spectacle vivant, il vise à renforcer leurs compétences entrepreneuriales et leur accès à de nouveaux lieux de diffusion. Coordonné par Occitanie en scène, le projet rassemble 12 partenaires et 15 partenaires associés des deux côtés de la frontière franco-espagnole, dont la majorité des scènes citées dans ces pages.