Sur les communes de Aussonne et Beauzelle, au nord-ouest de Toulouse, la construction du MEETT pèse 311 M€ et 55 ha de terrain. Il a été inauguré en septembre dernier à l’occasion de la Foire internationale de Toulouse, au terme de quinze années de gestation dont une liée à la parenthèse de la Covid-19. Vaisseau amiral des MICE (Meeting, Incentive, Congress & Events) de la métropole toulousaine, le seul à être localisé à l’extérieur du centre-ville, le MEETT hisse la collectivité au troisième rang du classement national des parcs des expositions et centres de conventions, hors Paris. Conçu et aménagé par l’agence du Néerlandais Rem Koolhaas, lauréat en 2000 du prix Pritzker, en collaboration avec les cabinets toulousains Taillandier Architectes Associés et Puig-Pujol Architectures, le MEETT voit grand pour le secteur du tourisme d’affaires et ses voyageurs qui représenteraient 70 % des visiteurs de la métropole selon l’agence d’attractivité de Toulouse Métropole : 70 000 m2 de surface événementielle, 7 halls (40 000 m2), un espace d’exposition extérieur (25 000 m2), un centre de convention (15 000 m2), un parking (5 000 places).
Engagement réel ou « greenwashing » ?
De quoi affoler le compteur du bilan carbone de ce chantier tout en béton (30 000 m3) et acier (plus de 7 000 tonnes, soit l’équivalent de la tour Eiffel). Sans compter la desserte routière du site, dont l’aménagement a déplacé 700 000 m3 de terre pour créer 4,2 km de voies rapides dans le prolongement de la RD 902, à proximité de la zone aéroportuaire de Blagnac. Le tramway demeure la seule offre de mobilité alternative à la voiture, en proposant une liaison directe depuis le centre-ville, environ 1 heure en comptant les arrêts et le petit quart d’heure de marche à pied à l’arrivée, ou depuis l’aéroport, à une vingtaine de minutes. Voilà pourquoi Maxime Le Texier, élu municipal d’opposition de la liste Archipel Citoyen et conseiller métropolitain n’hésite pas à dénoncer ce qu’il considère comme du « greenwashing » lorsque est évoquée la certification HQE (haute qualité environnementale) de niveau exceptionnel du MEETT et les mesures compensatoires : empreinte au sol minimale, site à énergie positive (10 700 panneaux photovoltaïques sur le bâtiment et les ombrières du parking ; centrale géothermique raccordée au réseau de chaleur Aeroconstellation), 10 ha aménagés avec la plantation de 973 arbres d’espèces endémiques, 20 417 plantes et arbustes, recyclage partiel des matériaux et du bitume sur place, sanctuarisation de 170 ha d’espace naturel … attestent pourtant d’un engagement écologique réel. Certes, la précision de certains chiffres est un brin déconcertante !
Conception exemplaire
« Elles ne sont et ne seront pas suffisantes pour compenser le bilan carbone de la construction du MEETT, sans compter celui que l’utilisation et la consommation du bâtiment et du site produiront à moyen et long termes, précise l’élu à la Métropole, M. Le Texier. Les certifications ISO (14 001) et HQE, la labellisation LEED NC [ qui s’intéresse à l’impact sanitaire dans le bâtiment, NDLR] ont leur limite, notamment celle de ne pas intégrer le calcul des émissions de gaz à effet de serre. Qui sera chargé du suivi et du contrôle des mesures ? », interroge cet ingénieur chez Airbus. Et comment la Métropole compte-t-elle tenir un engagement, par ailleurs intégré au Plan climat-air-énergie territorial (PCAET) ? « De par sa conception, le MEETT défend une exemplarité en matière environnementale et énergétique », répond Annette Laigneau, vice-présidente à Toulouse Métropole en charge de l’urbanisme et des projets urbains. Celle qui est également présidente d’Europolia, la société publique locale d’aménagement de Toulouse Métropole en charge du MEETT, ajoute que la collectivité « est allée très loin dans cette démarche ; c’est une volonté politique, intégrée dans le PCAET et défendue au niveau régional. Il est logique que, à partir de cette ambition, son suivi et son respect par l’exploitant de l’équipement [GL Events, NDLR] soient vérifiés ». Qu’en sera-t-il ? L’avenir le dira.
Adapter l’existant à Montpellier
Le défi de Toulouse Métropole – concilier performance économique, transition énergétique et sauvegarde de la biodiversité – rejoint celui de la région Occitanie pour sa propriété, à Pérols. La modernisation de son parc des expositions – Sud de France Arena jauge, elle, à 80 M€ pour 20 ha. À une dizaine de kilomètres de Montpellier, la vaste parcelle s’insère tout juste entre deux sites protégés d’intérêt communautaire Natura 2000 : les étangs de l’Or et de Pérols, réserves de biodiversité. Le « Pex Montpellier » (comme parc expo) connaît depuis le printemps une refonte globale, combinaison de rénovation et d’extension. Son propriétaire le veut plus grand, mais aussi plus vert, donc, au regard du programme des travaux engagé pour les cinq prochaines années. Objectif ? Faire de l’immense équipement régional « une vitrine de l’ambition de la Région en matiè̀re de développement durable », notamment le premier MICE à énergie positive en Europe, autosuffisant énergétiquement grâce au déploiement du photovoltaïque. Vu l’urgence écologique, la collectivité dirigée par Carole Delga mise gros, tandis que la gestion et l’exploitation du site sont confiées pour huit ans (2019-2026) à la société publique locale Occitanie Events, dont la Région est certes la principale actionnaire. D’autres collectivités locales sont partenaires : le Conseil départemental de l’Hérault, Montpellier Méditerranée Métropole, la Communauté d’agglomération du Pays de l’Or et la Ville de Pérols. Un temps long pendant lequel la Région souhaite « donner une nouvelle impulsion à ces équipements structurants : or, si nous voulons positionner l’Occitanie dans le peloton de tête de cette course qui se joue dans l’accueil de grandes manifestations nationales et internationales, nous devons changer de braquet pour faire entrer ces infrastructures dans le 21e siècle ».
Le cœur du projet
La première phase de travaux qui a démarré en mars 2021 prévoit l’extension de 3 000 m2 du hall B2. Le chantier devrait à terme agrandir la surface commerciale du site de 54 000 à 58 000 m2. Interconnexions spatiale et fonctionnelle constituent le cœur du projet. La pose de panneaux photovoltaïques sur les toits des différentes surfaces, halls et parkings, sans oublier celle de Sud de France Arena, pourrait permettre au MICE montpelliérain de devenir autosuffisant pour la fourniture d’énergie notamment. Outre le choix d’une végétalisation et d’une piétonnisation du site, destinées à « améliorer “l’expérience usager” » et à faire du Pex Montpellier « un vrai lieu de vie », l’Occitanie et ses partenaires ont également « identifié la question des accès aux infrastructures comme condition essentielle de leur développement ». Nul doute que le rythme de la navette des courriers entre la Région et la Métropole montpelliéraine va s’accélérer, et que l’occasion pour artdeville d’interroger l’une et l’autre se représentera bientôt. Sur les dispositifs et les orientations qui seront choisis, notamment en matière de résilience : une reconstitution partielle du biotope orginel est-elle prévue ? Car l’emprise parcellaire s’est faite, jadis, aux dépens des étangs. Des anciens bâtiments seront-ils conservés ou les matériaux issus de leur déconstruction réutilisés sur place ? Les matériaux neufs seront-ils biosourcés ? Quel sera le bilan carbone global du bâtiment et de son fonctionnement ?
À Toulouse comme à Montpellier, « faire entrer ces infrastructures dans le 21e siècle » et en faire des « vitrines en matière de développement durable » justifie un débat ouvert. À Montpellier, la Région a annoncé qu’« un comité de développement adossé à Occitanie Events avec des membres de la société civile a pour but d’identifier et proposer des axes de développement stratégiques afin d’accroître l’attractivité et le rayonnement du Parc des Expositions de Montpellier et de Sud de France Arena. Les réflexions, analyses, synthèses, propositions et recommandations résultant des travaux du Comité ont pour vocation d’orienter le conseil d’administration dans ses choix stratégiques. » Artdeville, qui a postulé pour suivre les travaux de ce comité, espère une suite favorable.